Pas de Souveraineté sans Souveraineté Numérique…
Il m’était impossible de décliner l’invitation de mes amis lillois d’Euratechnologies, me demandant de prendre part à leur événement « FutureProof Summit » qui se tenait le 17 mars dernier, tant la thématique de cette année – Souveraineté Technologique/Numérique – correspondait à mon engagement entrepreneurial depuis toujours. Ce fut donc un grand « Oui » que je leur ai adressé pour l’occasion mais aussi et surtout un grand « Oui » en faveur d’une Souveraineté Numérique Européenne. J’en ai profité pour désigner quelques leviers qu’il me semble urgent d’actionner et ai appelé à une mobilisation très concrète de tous les acteurs. Le temps n’est plus à la parole, il faut #FAIRE.
Inutile de revenir sur le contexte actuel qui voit s’enchaîner des crises d’une extrême gravité que personne n’aurait pu prédire ni même imaginer tant elles relèvent du pire. Cela doit nous conduire à une prise de conscience totale quant à nos responsabilités et surtout les actions à mener pour le futur. Je suis convaincu que l’on se situe à un point de bascule qui nous engage, un « momentum » historique. Entre un Numérique américain orienté business et consommation et un Numérique chinois favorisant un contrôle étatique, une troisième voie – « Third Way » – Européenne est possible replaçant l’utilisateur dans son rôle de Citoyen et alignée sur ce socle de valeurs qui nous unit en Europe. J’ai la conviction que la technologie doit servir à protéger les droits et à renforcer les libertés.
Le temps est à un « Buy European Act » à l’Européenne…
En cela, il faut arrêter d’être naïf… les gouvernements européens ont un rôle prépondérant à jouer. Aux Etats-Unis, « le job est fait ». L’Administration Biden dans son « American Buy Act » a fait passer la commande publique de 55% à 75% en faveur des acteurs nationaux. Dans le même ordre d’idée, le lancement de Palantir s’est accompagné d’un contrat d’un milliard en provenance des services secrets américains. Nos gouvernements européens doivent acheter des technologies européennes. C’est primordiale pour réaliser ce passage à l’échelle.
La réglementation n’est pas à opposer à l’innovation, bien au contraire, il faut la considérer comme une chance, un levier incitatif qui doit nous permettre de mieux rivaliser avec les géants actuels de l’internet. Il faut l’utiliser comme moyen pour protéger les nouveaux entrants, pourvoyeurs d’innovation, sur un marché qui de nos jours est fortement oligopolistique.
Cela m’amène bien évidemment à vous parler d’Open Source, car il est impossible de prôner l’activation de politiques incitatives en faveur de l’innovation sans faire le distinguo à la base entre des solutions technologiques Open Source qui auront l’effet d’un accélérateur durable pour l’ensemble des acteurs et des filières avec, à l’inverse, des solutions propriétaires qui provoqueront une concentration de la valeur entre les mains d’une toute petite poignée d’acteurs uniquement, comme c’est le cas aujourd’hui. En cela, l’un des leviers peut être la fiscalité en servant à encourager les entrepreneurs à recourir aux briques technologiques ouvertes et vertueuses que chez LINAGORA on appelle la « GoodTech« . Ce qui nous amène notamment à aller au delà cette notion de « Tech for Good » pour parler de « GoodTech for Good » mais j’aurais l’occasion de vous en reparler très prochainement.
Nous avons nos propres Champions en Europe…
Chez LINAGORA, ça fait plus de 20 ans qu’on fait le job, avant même l’arrivée des plateformes pour proposer à nos clients et partenaires des alternatives logiciels qui ne les enferment pas en situation de dépendance à un éditeur. De la suite bureautique, aux outils collaboratifs, en passant par les technologies d’IA de reconnaissance vocale, on s’attaque à tous les sujets clés des usages numériques en entreprise. Évidemment on n’est pas les seuls à produire de la « technologie émancipatrice », un certain nombre de Champions existent d’ores et déjà en France et en Europe, il faut simplement les mettre davantage en avant. Ce sont des exemples et « role models » qui doivent être reconnus du plus grand nombre pour être utiles à tous. Je citerais:
SenX, Clever Cloud, Rapid.Space, CryptPad, VideoLan, e fondation…
Et que dire de la nouvelle génération de solution open source de serveur Email, James, développée par la Fondation Apache… Elle a été retenue par le gouvernement estonien pour déployer plus d’un million de boites mail à destination de tous les résidents notamment pour gérer des usages d’authentification en s’affranchissant des Gmail et autres Yahoo et permettre l’accès aux services publics, à du stockage de données dans un respect total de la vie privée et ce à vie! Il serait temps de s’y mettre nous aussi… Il est grand temps de se libérer des plateformes.
Tous les gouvernements en Europe seraient bien avisés d’en faire autant. Ce serait une utilisation particulièrement productive de l’argent et investissement publics, permettant de créer de véritables « standards européens » en la matière, agissant comme autant de pierres inamovibles à la réalisation concrète de notre Souveraineté Numérique en Europe.
Oui une Souveraineté Numérique Européenne est possible!
A mon niveau d’entrepreneur, je propose à mes pairs de nous constituer en une alliance d’acteurs de la Tech Européenne au service de ces valeurs afin de construire cette 3ème voie numérique en Europe. C’est possible, rassemblons nous, 1+1… et ça commence là tout de suite, maintenant…