Digital Workplace TV 2023

Le 23 mars dernier, en marge du salon Digital Workplace 2023 qui se tenait à Paris Porte de Versailles durant 3 jours, j’ai eu le plaisir de répondre aux questions de Kayla Roark pour les besoins du plateau TV dédié à l’événement. L’occasion était belle de revenir sur une série d’annonce, de messages clés pour notre industrie et bien sûr comme à chaque fois avec Kayla l’énergie et l’enthousiasme étaient au rendez-vous !

Kayla Roark : Bienvenue sur Digital Workplace TV, en partenariat avec « nouvelles voix », l’agence de création de contenu pour la communication interne. Je suis ici avec mon invité Alexandre Zapolsky, Président et Fondateur de LINAGORA. Bienvenue, Alexandre. Donc vous êtes le CEO et Président Fondateur de LINAGORA. Est-ce que vous pouvez nous présenter LINAGORA ?

Alexandre Zapolsky : Oui, LINAGORA, c’est un éditeur de logiciels Open Source, c’est une entreprise que j’ai créé il y a 23 ans, presque un quart de siècle, et les métiers de LINAGORA, on en a 3.

Le premier des métiers est de fabriquer des logiciels libres, des logiciels Open Source. On fabrique notamment une Digital Workplace qui s’appelle Twake, qui est de plus en plus populaire, qui rencontre de plus en plus de succès, c’est l’alternative Open Source à Teams.

Et puis derrière Twake, on a toute une série de logiciels, dont notamment une solution de messagerie absolument innovante, qu’on appelle Team Mail. Je vais vous en reparler juste après. Et à côté de ça, on a deux métiers historiques. Le premier, c’est d’être en mesure de supporter, de maintenir, bien sûr, nos propres logiciels, mais tous les logiciels libres, qui proviennent des communautés. Nous sommes un grand fournisseur en marque blanche de support et de maintenance, des composants Open Source utilisés par nos clients.

Et le troisième métier, c’est que nous intervenons en Professional services, nous sommes naturellement experts d’un grand nombre de briques technologiques, et quand les grands clients cherchent le mouton à 5 pattes, il y a de fortes chances qu’il puisse le trouver chez nous à LINAGORA.

Kayla Roark : Justement, j’aimerais en parler, de ce besoin client et utilisateur final, parce que, 23 ans d’expertise, plusieurs logiciels, beaucoup de solutions. Donc pour les clients, quand ils viennent vous voir, qu’est-ce qu’ils recherchent ?

Alexandre Zapolsky : Ils cherchent principalement, aujourd’hui, des solutions alternatives aux grandes plates-formes propriétaires, les fameux GAFAM. Pour plusieurs raisons, en fonction de qui ils sont, et de leur propre maturité. Une partie d’entre eux, ce sont des grands clients, qui sont aujourd’hui utilisateurs notamment des plateformes Microsoft.

Le COVID a accéléré l’adoption des plateformes de communication et de collaboration, et quasiment aujourd’hui toutes les grandes organisations se sont équipées. La difficulté c’est que ces grands acteurs pratiquent aujourd’hui des politiques de prix, où ils augmentent leurs prix tous les 6 mois. Ça c’est vraiment extraordinaire, et les augmentations, par exemple, la semaine passée, je discutais avec le DSI, d’un très grand groupe français, et il me disait :

Alexandre, on va commencer notre négociation avec Microsoft. Le début de la discussion, c’est +30 % annuel sur les prix qu’on utilise déjà. C’est juste énorme. Imaginez que vos fournisseurs traditionnels fassent +30 % pour le même service, personnes accepteraient ça. Et, donc les grands comptes n’acceptent pas ça non plus. Et donc là, ils sont en recherche d’alternatives.

Et donc parmi ces alternatives, on a notamment notre outil Twake, qui regroupe l’ensemble des services associés pour répondre à tous les besoins d’usage quotidien du travail collaboratif en entreprise. Ce n’est pas uniquement la partie Tchat d’entreprises, il y a aussi la partie visioconférence, la partie messagerie, enfin l’ensemble des composantes, d’une Digital Workplace.

Et puis à côté de ça, vous avez une partie des clients qui viennent nous voir, enfin des prospects qui viennent nous voir, ils ne sont pas nécessairement encore client, qui sont des gens intéressés par l’enjeu de souveraineté numérique, l’idée d’indépendance technologique, de souveraineté numérique.

Kayla Roark : Justement, comment vous traitez ça ?

Alexandre Zapolsky : Vous savez qu’en Europe, depuis la décision dite Schrems II, il est interdit d’utiliser des services SaaS hébergés en dehors de l’union européenne, ou fournis par des acteurs américains. C’est interdit. Tout le monde continue à le faire. On continue d’ailleurs y compris à célébrer dans la French Tech des boîtes dont l’offre repose principalement sur les offres des Gafam, mais c’est juste interdit en Europe.

Donc naturellement, il y a un certain nombre d’acteurs qui sont soit des acteurs dans des domaines sensibles, soit ils sont soumis à des régulations et ont l’obligation d’aller chercher une alternative.

Nous, nous proposons des alternatives. Nos services, c’est, bien sûr du made in France, mais au delà de ça, c’est hébergé sur des plateformes en Europe. Notre grand partenaire aujourd’hui c’est OVH. Nous respectons, bien sûr, le RGPD, ça c’est pour nos offres qui sont en mode SaaS, et / ou nous installons directement dans les data centers de nos clients en mode on-premise nos solutions.

Donc pour résumer, il y a l’élément prix, et en second, l’indépendance technologique, ou, dans le cadre des États, ce que l’on appelle la Souveraineté Numérique. Ce dernier point est vraiment un mouvement extrêmement fort. Et ce qui est assez étonnant, c’est que nous sommes en train de connaître dans le domaine de la Digital Workplace, ce que l’on a connu dans le passé sur d’autres briques du système d’information. Et moi, je pense que l’on va connaître absolument un rééquilibrage, parce que il n’y a aucune raison de payer aussi cher des solutions qui sont bonnes, mais pour lesquelles on a aujourd’hui des offres qui sont aussi bonnes que celles des Gafam.

Kayla Roark : Donc aujourd’hui, on est sur le salon, et j’aimerais savoir qu’est-ce que vous présentez ici pendant ces jours ?

Alexandre Zapolsky : Alors, la grande annonce que nous faisont notamment dans le cadre de Digital Workplace 2023, c’est la mise à disposition de notre solution de messagerie, qui s’appelle Team Mail, et qui a vraiment une très belle histoire. Faut que je vous la raconte, c’est pas très long…

Il y a quelques années de ça, grâce au programme d’investissements d’avenir, on a commencé à investir autour d’un standard qui s’appelle le Jmap. Alors le Jmap, c’est l’évolution naturelle de ce qu’on appelait l’Imap. Tous les systèmes de messagerie reposaient sur de l’Imap. Et donc il y a quelques années, les organismes de normalisation d’internet se sont dit, on peut pas rester avec ce vieux protocole pour la messagerie, à l’heure du cloud et de l’intelligence artificielle. Et donc, ils ont décidé de normaliser, de standardiser, un nouveau standard de l’internet, en l’occurrence, c’est l’IETF qui a décidé de créer ce nouveau standard de l’internet. C’est des gens qui font, par exemple, l’html, l’xml…

Et donc, là, ils ont normalisé le Jmap. Et nous, avec les équipes de LINAGORA, on a décidé très tôt de nous investir, y compris dans la standardisation, ce qui est très rare pour une boîte française, parce que c’est d’innombrables réunions, tout ça, en langue anglaise, donc d’habitude, qui sont là-dedans, principalement les Gafam. C’est d’ailleurs leur force de normaliser les standards de l’internet, et donc, nous, on a participé, et puis ensuite, on s’est rapproché d’une communauté de la Fondation Apache. La Fondation Apache est tout simplement la plus grande fondation Open Source au monde, qui avait commencé à implémenter ce standard dans une solution dite de référence, qui s’appelle James. De notre côté, chez LINAGORA, nous avons commencé à coder dans James il y a 9 ans de ça !

Donc il y a 9 ans, c’était vraiment 2-3 mecs qui se battaient en duel. Et vraiment, il n’y avait rien, il y avait un patrimoine de code très faible. Il y avait l’intention qui avait été posée. Et donc nous, nous avons contribué énormément au code dont celui dédié à James. Nous avons contribué peut-être à hauteur de 70-80 % du code de James, ce sont principalement des équipes de LINAGORA qui ont écrit le code de James.

Il se trouve qu’aujourd’hui, tout le monde s’est rendu compte qu’il fallait faire de l’email différemment, que le Jmap c’est la bonne solution, que pour mettre en oeuvre le Jmap la bonne solution technique c’est James et donc il y a une ruée vers James, et donc ça c’est en train de nous profiter à fond. On a des sollicitations qui proviennent de partout dans le monde c’est vraiment incroyable. Il n’y a pas un jour, où l’on a pas des gens qui nous disent mais « Hey LINAGORA, vous êtes derrière James », voilà c’est ça notre projet…

Et donc pour vous donner des exemples clés de réalisations, par exemple l’Estonie, le gouvernement Estonien qui est bien connu comme leader de l’e-administration, a fait le choix de mettre en place une messagerie pour l’ensemble de ces citoyens : 1,3000000 de citoyens Estoniens ont accès à une messagerie offerte par le gouvernement estonien. Et ça, ça a été fait sur James.

Nous-mêmes en France on a aussi réalisé la messagerie du GIE carte sésame vitale, vous savez la carte vitale verte que l’on connaît tous bien. Et bien quand vous allez à la pharmacie avec votre ordonnance, vous voyez votre pharmacien qui dématérialise, il scanne l’ordonnance du médecin et ça part via un protocole de messagerie, alors avant c’était des gros serveurs Imap rangés, je ne sais plus combien de centaines, et donc on a remplacé tout ça par un cluster Jmap et ça ne doit jamais tomber en panne. Ce sont des volumétries juste colossales, chaque jour, de dématérialisation qui sont faits et qui passent en fait par ces flux, cette messagerie Jmap.

Nous sommes évidemment très très fiers de participer à la transformation d’une grande partie des systèmes d’information du monde grâce à cette solution de messagerie.

Et alors Team Mail dans tout ça, parce que j’en ai toujours pas parlé… Team Mail c’est quoi? C’est James mais avec des fonctions avancées, parce que la communauté Apache, elle n’implémente que le standard. Donc si on veut mettre des fonctions avancées que les clients attendent, des fonctions de délégations par exemple, en entreprise je ne gère pas forcément ma mailbox, un patron il délègue à la secrétaire par exemple. Donc il faut en fait pouvoir offrir ça et donc tout ça c’est dans Team Mail, et ce n’est que le début…

Vous savez aussi que nous sommes très actifs dans le domaine de l’intelligence artificielle, on est derrière une solution qui s’appelle LinTO qui fait du speech-to-text, qui est utile pour imaginer demain les solutions d’IA conversationnelles Open Source concurrentes à TcahtGPT. Nous travaillons là-dessus avec le CNRS, et donc tout ça, nous le faisons rentrer dans la messagerie, puis dans la Digitale Workplace, bref on vit des moments extraordinaires !

D’ailleurs, nous recrutons, si jamais quelqu’un cherche un boulot et regarde cette vidéo prenez contact avec nous : welcometolinagora.com c’est le nom du site internet.

Kayla Roark : J’aimerais finir avec une dernière question Alexandre, c’est sur les tendances, parce que, vous voyez beaucoup de choses, vous recevez des demandes de partout dans le monde, vous êtes très actif dans ce qui se passe en France, au niveau Européen. Est-ce que vous pourriez partager une tendance, dans les Digital Workplace, que vous voyez ?

Alexandre Zapolsky : Peut-être pas une, mais deux. La première, je reviens dessus, c’est le sujet de la souveraineté numérique. C’était absolument dans aucun des radars, et depuis 2 ans, c’est dans le radar d’à peu près tout le monde. Et donc, tout le monde, avec la guerre en Ukraine, a compris qu’en fait, il y avait un sujet essentiel de souveraineté. Ça concerne en fait beaucoup de domaines, mais ça concerne aussi le numérique, et tout le monde a compris qu’il était en fait du devoir de chaque pays, et de chaque bloc de pays, de chaque grand bloc, de maîtriser ces systèmes.

Là-dessus, s’il y a quelque chose d’un peu universel, qui permet à chacun de récupérer de la maîtrise, c’est bien l’Open Source. Et là, c’est vraiment en train de tirer tout le business des Digital Workplace Open Source. Il y a la nôtre, il y a Twake, mais aussi celle de nos copains, Netframe par exemple et donc, tous ceux qui jouent le jeu de l’Open Source, sont vraiment tirés en avant, par le marché.

Et la deuxième, en plus de la souveraineté, c’est bien sûr le couplage de tout ce qui est IA et Digital Workplace. On attend du Digital Workplace bien plus aujourd’hui qu’un outil statique. On veut une forme d’intelligence collective, et même individuelle, et on veut augmenter encore la productivité. On est là-dessus. Les GAFAM sont en train de montrer les cas d’usage. Vous avez vu que nos collègues de Microsoft, nos confrères de Microsoft, ont intégré TchcatGPT à travers une fonction qui s’appelle copilote, et qui rénove complètement ce que peut faire une Digital Workplace, pour l’utilisateur final.

Moi, le message que je passe, bien sûr, ne mettez pas le coeur de vos data, le coeur de l’intelligence de votre entreprise, dans ces solutions d’IA fournies par les GAFAM, parce que vous êtes en train de leur confier tous vos « assets numériques », toute l’intelligence de vos entreprises. Donc, c’est un drame. Honnêtement, je ne comprends pas que nos États ne mobilisent pas plus de moyens pour être capable de créer massivement des alternatives.

Donc nous, c’est en tous cas le message qu’on passe aujourd’hui à L’État, au CNRS, etc. Nous travaillons sur ces sujets-là. Si ça vous intéresse, prenez contact avec nous. Et, donc ça, c’est une tendance sur les 10 prochaines années, on va bosser là-dessus comme c’est pas possible. On verra, on parlera de ça ensemble, l’année prochaine.

Kayla Roark : Ça marche. Merci beaucoup Alexandre, et merci à vous d’avoir écouté notre vidéo.

Interview Digital Workplace TV 2023 – Alexandre Zapolsky par Kayla Roark pour NOUVELLES VOIX – En direct 📺 de Paris Porte de Versailles