Le sommet mondial de l’Open Government Partnership s’est réuni à Paris cette semaine. C’est une opportunité pour la France d’incarner un leadership en matière d’e-gouvernement. Elle dispose pour cela d’atouts considérables, à condition de faire les bons choix.
Cette semaine, du 7 au 9 décembre se tient à Paris le sommet mondial de l’Open Government Partnership (OGP). Sorte de COP21 d’une gouvernance moderne et ouverte, ce programme rassemble plus de 70 gouvernements à travers le monde. En rejoignant ce programme, les membres de l’OGP prennent l’engagement de s’associer à la société civile pour favoriser la transparence, renforcer le pouvoir des citoyens, lutter contre la corruption et améliorer leur gouvernance grâce aux nouvelles technologies.
Fondé sur la transparence, la participation et la collaboration, l’OpenGov ne peut fonctionner que grâce à des outils numériques puissants. Ces nouveaux systèmes d’information doivent permettre de répondre aux enjeux liés à l’asymétrie naturelle des échanges entre l’Etat et la société civile.
La France a pris la présidence de ce programme international. Il existe une opportunité pour rassembler le monde autour des valeurs démocratiques et universalistes que la France a fait naître. L’histoire de l’OpenGov (Open Data, Open Innovation et Open Source) partage un grand nombre de points communs avec l’histoire des Lumières. Ces deux mouvements naissent d’une rébellion contre l’autorité, contre un ordre établi considéré comme obscurantiste. Tous deux donnent une place fondamentale à la science et la technologie. Toutes deux portent le rêve d’une société civile mondiale entraînant dans leur sillage des bouleversements culturels, économiques et sociétaux.
Là où le Siècle des Lumières a conduit la France à la Révolution et à la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, l’adoption par notre pays de l’OpenGov est en mesure de provoquer une révolution numérique d’une portée similaire.
Au terme du Siècle des Lumières, notre pays à réussi à provoquer une vague mondiale d’engouement pour sa vision démocratique ; cette opportunité se présente à nouveau. A l’occasion de ce sommet mondial, la France peut porter une nouvelle ambition démocratique, celle des « Lumières 2.0 ».
La France a tout pour réussir
Pour réussir ce pari, la France dispose d’un atout considérable : son savoir-faire. Elle a en effet été reconnue par l’ONU en 2014 comme leader en Europe et 4ème dans le monde de l’e-gouvernement et s’est même hissée à la première place mondiale des services publics en ligne. Avec par exemple des initiatives à succès comme www.data.gouv.fr ou l’utilisation massive de logiciels Open Source par la Gendarmerie Nationale et par le Ministère des Finances, la France a fait le pari réussi depuis déjà plusieurs années de l’Open Data (grâce notamment à la mission Etalab), de l’Open Innovation et de l’Open Source.
Ces initiatives créent des dynamiques vertueuses. À titre d’illustration, dans le cadre des programmes des Investissements d’Avenir, l’État a fait confiance à un consortium emmené par Linagora et regroupant des PME innovantes (XWIKI et NEXEDI) et des laboratoires de recherche français de renom (le LORIA, Armines, TSP et le LI-X) pour créer un projet de plate-forme Libre.
Cette plateforme OpenPaaS a permis ainsi de développer une solution innovante et des savoir-faire extrêmement pointus. Aujourd’hui, nous restituons les fruits de cet investissement en mettant librement à la disposition de la communauté mondiale de l’OGP, à l’occasion du hackathon « OGP ToolBox », notre solution en vue de créer une plate-forme libre de consultation citoyenne disponible pour tous les Etats.
Le cas d’OpenPasS n’est pas isolé et cette richesse du tissu industriel français est un atout considérable.
La France est aussi forte dans ces domaines grâce à l’implication de ses acteurs publics. Via le Secrétariat Général pour la Modernisation de l’Action Publique (SGMAP) directement rattaché au Premier ministre et avec l’implication de Jean-Vincent Placé, secrétaire d’État chargé de la Réforme de l’État et de la Simplification lui aussi directement rattaché au Premier Ministre, la France pilote au plus haut niveau de l’État sa politique d’e-gouvernement. Cette implication du public et du privé est la condition même de la réussite de la mise en place d’un Gouvernement Ouvert.
À gouvernement ouvert, outils ouverts !
Le gouvernement ouvert ne peut fonctionner sans des outils numériques – un système d’e-gouvernement, souvent appelé Egov. Ces outils doivent répondre efficacement à des enjeux massifs car ils concernent tous les citoyens et toutes les sphères de la vie publique. Ils doivent être performants et adaptables aux stratégies digitales des membres de l’OGP.
Mais plus fondamental encore que la réflexion sur les critères de performance, le devoir des gouvernements est de sélectionner des outils capables de respecter l’ambition éthique d’un gouvernement ouvert : il est donc essentiel que ces outils s’appuient sur des technologies et des standards ouverts et interopérables. Cette exigence implique nécessairement que ces outils soient bâtis avec des Logiciels Libres pour assurer la souveraineté numérique des États, la mutualisation et le partage des ressources, la réduction et la maîtrise des coûts pour les utilisateurs.
La France dispose de ces outils et a la légitimité, historique et actuelle avec la Présidence mondiale de l’OGP, pour diffuser ce nouvel esprit démocratique. La France peut et doit montrer qu’elle sait toujours innover et transposer la démocratie et les valeurs universelles qu’elle promeut dans les nouveaux paradigmes numériques.
Alexandre Zapolsky, PDG de LINAGORA